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Jaime, je n'aime pas : cela n'a aucune importance pour personne ; cela apparemment n'a pas de sens. Et pourtant, tout cela veut dire : mon corps n'est pas le même que le vôtre.
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Bien que souvent présenté comme un antimoderne, selon la formule contestée d’Antoine Compagnon [1], Roland Barthes est, volens nolens, éminemment présent à l’ère numérique sa description du monde comme un espace plat de signes global permet de comprendre la conversion du monde en data ; sa manière de chroniquer la vie ordinaire et sensible donne un puissant exemple de nos individualités numériques ; sa manière, par liens et par gambades, de naviguer de lieux en lieux culturels préfigure l’hypertexte ; son rêve d’un texte scriptible » [2] mêlant lecture et écriture anticipe nos textualités enchevêtrées et collaboratives. Bref, Barthes, sa manière de collectionner des biographèmes » en des sortes d’albums hypertextuels, ses projections subjectives étoilées invente par anticipation le web qui nous est contemporain. Une telle influence conceptuelle forte, explicitée par certains dispositifs numériques comme le projet Barthes-vision [3], n’a rien de magique, mais s’explique par la contemporanéité du premier web et du dernier Barthes. Le contexte historique Figure 1 – Le Minitel, ancêtre du Web L’œuvre théorique de Barthes côtoie la décennie même où s’invente le Web 1969 première connexion d’ordinateurs en réseau-1979 création des premiers forums de discussion, Barthes entre au Collège de France au moment où le minitel » envahit les foyers français et meurt à l’orée de la décennie qui fera le développement du Web. Il précède les aventures des avant-gardes en matière de jeu littéraire informatique et meurt quelques mois avant la création de l’Atelier de Littérature Assistée par la Mathématique et les Ordinateurs » ALAMO par les oulipiens [4] et la parution de Literary machines de Ted Nelson. Il baigne dans le rêve cybernétique né dans les années 60, à une heure où Jacques Derrida, Gilles Deleuze ou Michel Foucault abusent du terme de machine ». D’où ce que Éric Marty a appelé le jargon cybernétique de Barthes » [5] – dans le Système de la mode des notions comme celle de briques de code » ou de sous-routine » sont issues de Mandelbrot et des premiers théoriciens de l’information, Barthes utilisant le mot cybernétique » lui-même en diverses occasions, par exemple pour caractériser les Exercices spirituels de saint Ignace de Loyola [6]. Ailleurs, lorsque Barthes décrit la rhétorique, il nous explique que Aristote conçoit le discours l’oratio comme un message et le soumet à une division de type informatique » [7]. Un texte de jeunesse, en apparence anodin, est à ce titre révélateur dans un article des Lettres nouvelles de 1959, compte rendu d’une visite au Salon de l’équipement de bureau, Barthes admire la manière dont l’homme humanise la machine en lui donnant la structure de son propre cerveau » ce n’est pas un salon des techniques mais des structures » [8] poursuit-il en faisant briller la machinerie linguistique de toute sa technicité. Figure 2 – Les premières pages Web L’obsession du récit de soi L’ethos barthésien, son narcissisme artiste et sa manière très particulière de le projeter dans le monde pour s’y comprendre ont, implicitement ou explicitement, trouvé dans les mutations de l’identité personnelle à l’heure du Web et des réseaux sociaux, de singuliers échos. Pensons à l’habitude singulière de Barthes consistant à documenter sa vie constamment, qui évoque presque la manière dont Jacques Derrida conservait à la même époque le moindre brouillon et notait en permanence le fil du quotidien, pensons à son hédonisme et au souci de soi, proche de celui théorisé par Michel Foucault l’écriture est une quête de soi et la quête de soi une écriture, dans une tradition qui emprunte à Gide et à Proust mais qui ouvre avec Roland Barthes par Roland Barthes un espace d’invention personnelle qui en fera un des grands modèles de l’autofiction, et que l’on retrouvera mutatis mutandis dans les formes d’autodocumentation digitales. La conception barthésienne de l’identité autobiographique est assez éloignée de la linéarité du narrativisme » ricoeurien, quête de mise en intrigue et donc de mise en ordre cohérente, et consonne bien plus facilement avec nos narrations sociales numériques que le modèle de refiguration du philosophe – on pourrait même dire qu’elle en constitue une sorte d’horizon. La forme de vie barthésienne est en effet énigmatique, fragmentée et associative. Plurisémiotique, elle emprunte à la peinture et à la musique pour se réfracter. Elle recourt fortement à la mémoire visuelle et à la photographie comme attestation potentiellement tragique du réel. Elle se fragmente pour devenir ouverte, mobilisable toujours différemment, pour se libérer de l’emprise médusante de la langue. Elle cherche à se déprendre d’elle-même autant qu’à se ressaisir, elle fictionnalise aisément on se souvient du célèbre exergue du Roland Barthes par Roland Barthes Tout ceci doit être considéré comme dit par un personnage de roman ». Figure 3 – L’écriture manuscrite de Barthes La dimension affective, fortement incarnée mais aussi interpersonnelle et mobile de l’identité selon Barthes se dit à travers un concept original inventé par Barthes et devenu célèbre, celui de “ biographèmes ” », dont la distinction et la mobilité pourraient voyager hors de tout destin et venir toucher, à la manière des atomes épicuriens, quelque corps futur, promis à la même dispersion » [9]. Si les biographèmes ne sont pas sans parenté avec nos statuts » numériques contemporains sur les réseaux sociaux comment ne pas reconnaître dans ce que Barthes décrit comme une vie “trouée ” » [10] quelque chose de nos inscriptions sur les fils des réseaux sociaux, marqués par la fragmentation, le recours à la photographie, la prééminence des affects au profit d’une quête infinie de traits propres dans l’univers commun ? Les écritures autobiographiques numériques du sujet sur Facebook ou Twitter, même en dehors de tout projet artistique, possèdent de fait des caractéristiques originales d’ouverture et d’entrelacement, une logique affective et associative, une prééminence de la photographie, qui permettent de les rapprocher du modèle influent du Roland Barthes par Roland Barthes. J’aime, je n’aime pas cela n’a aucune importance pour personne ; cela, apparemment, n’a pas de sens. Et pourtant tout cela veut dire mon corps n’est pas le même que le vôtre. Ainsi, dans cette écume anarchique des goûts et des dégoûts, sorte de hachurage distrait, se dessine peu à peu la figure d’une énigme corporelle, appelant complicité ou irritation. écrivait Roland Barthes dans son autoportrait [11], dans une étonnante anticipation des chroniques égocentrées de nos humeurs appréciatives ou réversions subjectives au cœur de l’expressivité littérale et littéraire de soi agrémenté de selfies comme Barthes agrémenté son autobiographie de portraits sur Facebook. Vivre dans un monde de réseau Le concept de réseau est omniprésent chez Barthes. Il joue un rôle crucial dans le passage du structuralisme rigide des années 60 à un post-structuralisme aux formes herméneutiques plus mobiles et ajustables. Le premier » Barthes utilise le mot réseau dans un sens structuraliste canonique il parle, dans le Michelet de 1955 d’un un réseau organisé d’obsessions » [12], d’un réseau thématique » [13], d’un réseau rhétorique » [14], en 1970 dans S/Z d’un réseau impersonnel de symboles » [15]. Il introduit la notion de réseau distributionnel » [16] et abuse du terme de dispatching » par exemple pour décrire la narration réaliste dans son célèbre article sur l’effet de réel » de Communications en 1968 pour caractériser le fonctionnement du réseau. Barthes va emprunter à la grammaire générative de Nicolas Ruwet et l’idée du dispatching markovien » c’est-à-dire d’un dispositif pré-cybernétique capable d’engendrer une infinité de chaînes de mots à partir de séquences finies [17], dans une nouvelle illustration de la passion barthésienne pour les concepts ardus. Mais, dès S/Z, le glissement vers des métaphores nouvelles est entamé Barthes parle de texte étoilé » [18], notion que Barthes promeut contre les structures rigides » car elle produit des constellations » [19] sémantiques à partir d’un texte. Ce déplacement est évident lorsque le second Barthes » affirme en 1975 que l’analyse textuelle préfère la métaphore du réseau, de l’intertexte, d’un champ surdéterminé, pluriel » à la métaphore de la filiation, du “développement” organique » [20]. Ces réseaux intertextuels sont comme la contrepartie littéraire du Web en train de s’inventer, héritage clairement analysé par George Landow dans son essai de 1991 Hypertext. The Convergence of Contemporary Critical Theory and Technology réédité sous le titre Hypertext l’idée barthésienne d’un texte sans centre ni limite car extensible à l’infini [21] tout texte est un intertexte » [22] joue un rôle séminal dans la conception émergente d’un hypertexte numérique, où la navigation ne se fait pas d’idée en idée mais simplement de mot en mot. Figure 4 – Le Fichier Barthésien Cette idée est fortement connectée à la pratique rédactionnelle ordinaire de Barthes, qui lui fait utiliser un système de fiches interconnectées par des annotations, des listes et des renvois, fichier papier hypertextuel que Tiphaine Samoyault place au centre de l’organisation de la pensée barthésienne En amont, il y a bien sûr le dossier de notes et d’ébauches rassemblées par Mallarmé pour le Livre », dont la matière dispersée et fragmentaire est contraire au livre pur qu’il fantasmait ; mais en aval, il y a aussi cet horizon d’une combinatoire que rejoindront à peine dix ans plus tard les mécaniques hypertextuelles offertes par le réseau des réseaux du World Wide Web [23]. Cette obsession du terme de réseau » que Barthes utilise dans de très nombreux contextes théoriques n’est pas non plus sans écho aux habitudes personnelles de l’auteur des Mythologies la vie sociale se décrit comme un réseau de relations narcissiques » [24], la vie amoureuse se laisse fasciner par les petites annonces qui plaisaient tant à Barthes, la vie érotique a pour modèle les rencontres en réseau de Tricks de Renaud Camus dans les Fragments d’un discours amoureux, Barthes décrit sa vie dans l’ordre des réseaux sentimentaux [25] et décrit formidablement ce qui sera la forme de jalousie propre aux réseaux numériques Supposez maintenant que je lâche dans ce réseau un sujet douloureux, avide de maintenir avec son autre un espace étanche, pur non touché, consacré ; les activités du réseau, son trafic d’informations, ses engouements, ses initiatives, seront reçus comme autant de dangers[26] Des signes et des données Un grand geste barthésien a été, on le sait, de renvoyer le monde à un système de signes le monde est aplati en une toile de signes liés en un réseau global, traversé par le remaniement imprévisible que l’oubli impose à la sédimentation des savoirs, des cultures, des croyances [27]». Je ne sais pas ce que Barthes aurait pensé de l’opposition faite par l’une de ses meilleurs interprètes, Susan Sontag, qui affirmait à la suite de Walter Benjamin qu’il y avait une distinction essentielle entre d’un côté les histoires, qui ont un but, une fin, une direction, sont complètes et closes et, de l’autre côté, l’information, qui est par définition toujours partielle, incomplète et fragmentaire [28] » le monde dataifié » de l’internet contemporain et sa syntaxe universelle est à sa manière un univers de signes où toutes les formes de cultures et de discours se recroisent. Cette universalité a été encore récemment soulignée par Jean-Marie Schaeffer dans sa récente Lettre à Roland Barthes [29], qui montre à quel point la grammaire transculturelle de Barthes possède une portée extrêmement large qui en fait un outil de choix pour comprendre l’omniprésence du narratif bien au-delà de son seul usage littéraire, extension indispensable à l’heure de la globalisation et des études cognitivistes. Le texte ouvert Un des traits marquants de la textualité numérique est sa capacité à brouiller lecture et écriture et, plus loin, à rassembler experts et amateurs [30]. On pourra ainsi reconnaître dans le flâneur numérique des réminiscences du Barthes collectionneur de textes en tous genres dans son entreprise de sémiotique universelle, ce qui nous laisser à rêver ce que le numérique aurait pu apporter au goût barthésien de l’album, modèle que Barthes oppose au livre et qui préside aux derniers textes. Roland Barthes par Roland Barthes et La Chambre claire se veulent un relevé de circonstances », discontinues » et rhapsodiques » [31] et proposent une représentation essentielle du monde comme inessentiel, comme tissu de contingences » [32] Figure 5 – Des manuscripts hypertextes avant la lettre Ainsi, le monde est compris comme un livre toujours à interpréter, et ce livre est à lire et à écrire il est scriptible » et nous conduit à d’infinies excursions, dans une écriture qui est déprise » il faut produire le texte, le jouer, le défaire, le faire partir »[33]. Et je me persuade de plus en plus, soit en écrivant, soit en enseignant, que l’opération fondamentale de cette méthode de déprise, c’est si l’on écrit, la fragmentation, et, si l’on expose, la digression, ou pour le dire d’un mot précieusement ambigu l’excursion. [34] Raconte Barthes dans la Leçon au seuil des pratiques excursionnistes du web invitant à surfer » d’un texte à l’autre, la réflexion barthésienne propose un modèle théorique et un vocabulaire d’interprétation aux textualités numériques. Surtout, elle valorise des pratiques d’écriture fragmentaire et de reprise dans lequel le lecteur est un interprète au sens musical et un coauteur du texte, qui s’insère dans les interstices de celui-ci comme un fantôme de l’avenir. Loin d’être minoritaire, cette lecture-écriture est fortement valorisée comme une méthode de pensée et une habitude de vie. L’influence des formules et des concepts mais aussi des modèles barthésiens sur la photographie et la peinture est bien connu et étudié [35]. L’hypothèse formulée par George Landow de la paternité de Barthes sur l’hypertexte, qui serait la version numérique du texte scriptible », en réseau, et dans lequel de multiples concurrentes entrées seraient possibles, promu par l’auteur de S/Z, est donc justifiée arraisonnant le monde sous la forme d’un langage universel de signes avant qu’il soit transformé en données, inventant une textualité ouverte, sensible et décentrée, préfigurant l’ère des j’aime » et des hypertextes enrichis par les amateurs, Roland Barthes est autant que Gilles Deleuze un des pères conceptuels des textualités numériques qui font désormais notre vie. [1] Voir le dernier chapitre de Antoine Compagnon, Les Antimodernes. De Joseph de Maistre à Roland Barthes, Paris, Gallimard, 2005. [2] Roland Barthes, Œuvres Complètes de Roland Barthes, Paris, Seuil, 2002 désormais OC, t. III, p. 122. [3] Voir [4] Voir [5] Eric Marty, préface aux OC, II, p. 17. [6] Sade, Fourier, Loyola, in OC, III, p. 751. [7] L’ancienne rhétorique », OC, III, p. 536. [8] Les deux Salons », OC, I, p. 992. [9] Sade, Fourier, Loyola, OC, III, p. 707. [10] Ibid. [11] Roland Barthes par Roland Barthes, OC, IV, p. 692. [12] Michelet in OC, I, p. 293. [13] Ibid., p. 431. [14] L’Ancienne rhétorique », OC, III, p. 599. [15] S/Z in OC, III, p. 197. [16] OC, II, p. 626. [17] Roland Barthes, Sarrasine de Balzac, séminaires à l’École pratique des hautes études, présentation et édition de Claude Coste et Andy Stafford, Paris, Seuil, 2011, p. 479 et note 1. [18] Ibid., p. 76. [19] OC, IV, p. 451. [20] Ibid., p. 456. [21] Voir Sophie Marcotte, George Landow et la théorie de l’hypertexte », L’Astrolabe, 2000, en ligne et Serge Bouchardon, Du récit hypertextuel au récit interactif », Revue de la BNF, vol. 42, no. 3, 2012, pp. 13-20. [22] OC, IV, p. 451. [23] Tiphaine Samoyault, Roland Barthes. Une biographie, Seuil, 2015, p. 652. [24] OC, III, p. 665. [25] Fragments d’un discours amoureux in OC, V, p. 114. [26] Ibid., p. 177. [27] Leçon, in OC, V, p. 446. [28] Susan Sontag, At the same time, Londres, Penguin, 2013, p. 224 c’est nous qui traduisons. [29] Jean-Marie Schaeffer, Lettre à Roland Barthes, Paris, Thierry Marchaisse, 2015. [30] Voir Patrice Flichy, Le Sacre de l’amateur Sociologie des passions ordinaires à l’ère numérique, Paris, Seuil & la république des idées, 2010 et Adrien Chassain, Roland Barthes “Les pratiques et les valeurs de l’amateur” », LHT, n°15, 2015, en ligne [31] Roland Barthes, La Préparation du roman. Cours au Collège de France 1978-1979 et 1979-1980, Seuil, 2015, p. 203 [32] Ibid. [33] Le Bruissement de la langue in OC, III, p. 916. [34] Leçon in OC, V, p. 444. [35] Voir Magali Nachtergael, Roland Barthes Contemporain, Max Milo, 2015.
Qu'est-ce que la théâtralité ? C'est le théâtre moins le texte, c'est une épaisseur de signes et de sensations qui s'édifient sur la scène à partir de l'argument écrit. 0 Le femme commence là où finit l'histoire. 0 J'aime, je n'aime pas cela n'a aucune importance pour personne ; cela apparemment n'a pas de sens. Et pourtant, tout cela veut dire mon corps n'est pas le même que le vôtre. 0 L'automobile est un équivalent assez exact des cathédrales gothiques. 0 Pour l'écrivain, la littérature est cette parole qui dit jusqu'à la mort je ne commencerai pas à vivre avant de savoir quel est le sens de la vie. 0 Ecrire c'est ébranler le sens du monde, y disposer une interrogation indirecte, à laquelle l'écrivain, par un dernier suspens, s'abstient de répondre. La réponse, c'est chacun de nous qui la donne, y apportant son histoire, son langage, sa liberté. 0 Le fascisme, ce n'est pas d'empêcher de dire, c'est d'obliger à dire. 6 Le langage est une peau je frotte mon langage contre l'autre. 10 La littérature ne permet pas de marcher, mais elle permet de respirer. 1 La Tour est une dentelle de fer. 5 Le toucher est le plus démystificateur de tous les sens, à la différence de la vue, qui est le plus magique. 7 Tout refus du langage est une mort. 4
Fragment R 1 1 Lecture aux Rencontres d’Arles le 8 juillet 2015 à l’invitation de Rodolphe Burger dans l’atelier ... 1 Racine, c’est Racine ». 2On connaît la critique virulente que Roland Barthes fait de cette tautologie anti-intellectualisme petit-bourgeois le pire, arrogance, spontanéisme, refus de la pensée et de la critique, etc. 3Tout cela admirablement résumé en 4 Racine, c’est Racine sécurité admirable du néant » 5On sait combien, plus tard, Roland Barthes devait être atteint par le conflit que déclencha son Sur Racine ; il apprit à ses dépens que Racine, c’est Racine » et qu’il ne faut pas toucher à l’incarnation tautologique du génie national. 6Cette polémique lui donnait donc raison, lui qui, de plus n’aimait pas Racine ! 7N’y a-t-il vraiment rien à dire en faveur de cette tautologie ? 8L’actrice qui déclenche l’ironie de Barthes vient de jouer le rôle d’Athalie. Qu’a fait cette actrice sinon dire Racine ». Barthes, lui, n’a pas su dire Racine. Il raconte que pour se désennuyer lors des nombreux voyages Paris-Urt, il a tenté d’apprendre la mort de Phèdre et qu’il n’y est jamais parvenu ! 9Moins théâtralement, cette tautologie énonce une proposition qui met en jeu un nom propre. Le nom propre est hors signifié il ne renvoie qu’à un être unique. Cette tautologie n’a rien à voir avec l’autre tautologie mentionnée par Barthes dans cette même mythologie un sou est un sou ». Car il s’agit alors d’une stricte équivalence – et même selon Marx de l’équivalence générale » – alors que Racine c’est Racine » tente d’évoquer l’incomparable. 10Il écrit lui-même le nom propre est une monstruosité sémantique, il est le siège d’un phénomène d’hypersémanticité qui l’apparente de très près au mot poétique » Proust et les noms. 11Que dire de Roland Barthes sinon que c’est Roland Barthes – ou bien qu’il est Roland Barthes ? et comment faire la différence entre ce qu’il est et qui il est ? Roland Barthes écrit un Roland Barthes par lui-même. Lui m’aime. Que désirer d’autre – sinon le même, le m’aime » ? Fragment B 12Dans Roland Barthes par lui-même on trouve un fragment intitulé j’aime/je n’aime pas ». Nous retrouverons plus tard le verbe aimer » et sa déclaration. Pour le moment, arrêtons-nous sur ce que Barthes dit ne pas aimer. 13La liste commence par les loulous blancs ». Bien entendu je m’intéresse à la répétition qui forme le mot loulou ». Je remarque aussi qu’il peut paraître surprenant que le blanc de ces loulous soit enveloppé dans le rejet de celui qui a créé l’expression d’ écriture blanche ». Il faut que le rejet des répétitifs loulous soit bien fort pour emporter le blanc avec lui. 14La liste continue les femmes en pantalon, les géraniums, les fraises, le clavecin, Miro, les tautologies » 15Je m’arrête à ce mot. Vingt-et-un autres mots et noms vont suivre jusqu’au etc. » final. Tautologie » est le seul terme qui désigne une forme langagière il n’y en a aucune dans la liste des j’aime » qui a précédé. 16Qu’appelle-t-on tautologie ? 17Barthes donne l’exemple de Bouvard et Pécuchet le goût c’est le goût ». 18Ce qui donne en somme, si on y pense, le principe du fragment j’aime/ je n’aime pas » !!!. 19Le goût, c’est le goût et le dégoût c’est le dégoût. 20Formalisé, cela donne A est A, B est B, etc. 21B est B, c’est la formule juste. Beaucoup se trompent et disent B=B ». C’est faux. Il existe des centaines de pages dans des traités de logique et de métaphysique pour tenter de dire le sens de B est B », qui n’est précisément pas une égalité. 22C’est Heidegger qui a donné l’expression la plus précise d’une pensée rigoureuse de la tautologie 23 La formule A=A indique une égalité. Elle ne présente pas A comme étant le même. La formule courante du principe d’identité voile précisément ce que le principe voudrait dire, à savoir que A est A, en d’autres termes, que tout A est lui-même le même. […] 24Il est donc préférable de donner au principe d’identité la forme A est A, et cette forme ne dit pas seulement Tout A est lui-même le même, mais bien plutôt Tout A est lui-même le même avec lui-même. L’identité implique la relation marquée par la préposition avec », donc une médiation, une liaison, une synthèse l’union en une unité. De là vient que, d’un bout à l’autre de l’histoire de la pensée occidentale, l’identité se présente avec le caractère de l’unité » Identité et différence. 25Lorsque Heidegger dit d’un bout à l’autre » il veut rappeler que la philosophie commence par l’énoncé de Parménide l’être est, le non-être n’est pas ». De Parménide à Heidegger et à aujourd’hui, on s’est posé la question du sens de être. 26Parménide l’être est », 2500 ans de philosophie plus tard Heidegger, l’être n’est pas ». Ça pourrait faire rire mais c’est 2500 ans de la pensée spéculative la plus haute ! Ce qui veut dire que être » n’est rien de simple. Ce n’est pas quelque chose » et en ce sens ça n’est pas. 27Le même, idem, est une pensée aussi difficile que celle de l’être. On est aux limites du langage, le langage défaille dès qu’on cherche à définir les mots les plus banals, c’est-à-dire ceux qu’on répète sans cesse. Or c’est bien de répétition qu’il s’agit ou de déport dans la tautologie, B est indifféremment sujet ou prédicat, chacun peut être déporté sur l’autre. Se pourrait-il que cette translation ne touche en rien à B ?. 28Qu’appelle-t-on tautologie ? Une double énigme ! Énigme que être », énigme que même ». 29La tautologie est-elle clôturante ? Non, Barthes. Non, justement parce qu’il y a énigme. Et peut-être le pressentez-vous, Barthes… 30Si on admet savoir ce qu’est une tautologie en affirmant qu’elle ne dit rien, pourquoi cette proposition aurait-elle le moindre intérêt ? Eh bien nous dit Clément Rosset, la tautologie rend justice au réel sur le point crucial de son unicité, elle nous rend attentif au fait émouvant que ce qui existe, existe ». 31J’ajoute qu’elle nous rend aussi attentif au fait parfois cruel que ce qui n’existe plus n’existe plus. 32Qu’est-ce qui se passe devant ces faits, ces émotions ? 33Il se passe ce que le bouddhisme nomme en japonais satori le réveil devant le fait. L’éveil plutôt. L’éveil devant le fait et par le fait. 34Pessoa les choses n’ont pas de signification elles ont une existence. Les choses sont l’unique sens occulte des choses » le Gardeur de troupeaux. Je relève occulte » c’est ce que j’ai tenté de dire, que le sens s’occulte, que le sens unique » s’occulte. 35Dernière remarque l’énoncé de Parménide se trouve dans un texte en vers, on parle du poème de Parménide. Et le poète nous dit cet énoncé l’être est, le non être n’est pas ». Il nous le dit en hexamètres dactyliques et il nous dit que c’est la seule parole, monos mythos, et qu’elle nous conduit hors des sentiers battus ! le contraire de Barthes ! 36Ainsi avons-nous quitté la logique, peut-être la métaphysique et aussi la rhétorique peut-être ne peut-on penser la tautologie que poétiquement ? Fragment T – tel 37Ce serait d’abord une poétique du TEL. Voire une rythmique, une idiorrythmie comme il dit à chaque étape, on retrouve le TEL. Et d’abord en amour. Comme écrit Barthes 38 Mon amoureux je le veux immortel ». Tel. Tel Quel. 39Cet accueil du tel va conduire Barthes au-delà de la critique de la tautologie. Dans Roland Barthes, roman, Philippe Roger écrit c’est l’un des coups de théâtre de ce discours amoureux que de réhabiliter la tautologie – à sa manière, la tautologie est intraitable. Ce qui dans la topique amoureuse est bien ». Intraitable la tautologie ? Trop tard… je poursuis mon petit traité… 40Exemples 41 Le bon amour relève de la pure tautologie ». 42 Que dire de ce qu’on aime, sinon je l’aime et le répéter sans fin » ? 43 Est adorable, ce qui est adorable », etc. 44Barthes reconnaît un certain pouvoir hypnotique au stéréotype quand on est amoureux on répète des mots dans la magie et l’enthousiasme. Est-ce la répétition qui engendre la jouissance ? 45Barthes avait examiné cette thèse dans le Plaisir du texte pour dire qu’il ne la partageait pas […] la répétition engendrerait elle-même la jouissance. Les exemples ethnographiques abondent rythmes obsessionnels, musiques incantatoires, litanies, rites [… or] répéter à l’excès, c’est entrer dans la perte, dans le zéro du signifié ». 46C’est donc plutôt la jouissance qui appelle la répétition, dont la tautologie est la forme absolue. 47D’un cliché l’autre, du cliché langagier au cliché photographique, ça se déclenche autrement ; ça devient amoureux. 48Et c’est l’amour qui va conduire Barthes à la photo du jardin d’hiver et à cette affirmation par nature, la photo a quelque chose de tautologique ». Cette tautologie consiste en ce que la photo est littéralement une émanation du référent ». 49Le tel » ou le c’est ça » ainsi parcourais-je les photos de ma mère selon un schéma initiatique qui m’amenait à ce cri, fin de tout langage c’est ça ». Le plat c’est ça » juste ça ». Rien de spécial. 50Si devant une photo ou un haïku, on est amené à dire c’est ça, c’est bien ça », ce n’est pas pour établir que la photo ou le haïku serait bien conforme au modèle, identique au référent, pas du tout en effet ça » lui-même ne préexiste pas dans le modèle mais a été produit par le texte du haïku ou par la photo. 51À propos de la mimesis, on sait qu’Aristote dans la Poétique dit d’un bon portrait qu’on pense c’est bien lui » et donc qu’il renvoie évidemment au modèle. Mais si on dit c’est ça », on aurait peut-être affaire à ce que Lacoue-Labarthe désigne comme une mimèsis sans modèle Je signale que dans la Chambre claire, Lacoue-Labarthe est cité par Barthes, j’imagine que celui-ci a trouvé du plaisir à se féminiser discrètement tout en se tautologisant. Par ailleurs, je me demande si dans la Chambre claire, Barthes ne se présente pas tout du long selon une certaine mimèsis de la Sainte Thérèse de Bernini – irradié jusqu’à l’extase – un des derniers mots du texte. 52Le ça » semble d’abord être une pure émanation du référent, ce qui ferait perdre tout caractère de ressemblance. On oublie alors qu’il a fallu l’intervention du photographe ou du poète comme si leurs œuvres étaient acheiropoïètes. 53Barthes le souligne lui-même dans la Chambre claire. La Photographie a quelque chose à voir avec la résurrection ne peut-on dire d’elle ce que disaient les Byzantins de l’image du Christ… à savoir qu’elle n’était pas faite de main d’homme, acheiropoïetos ? 54Dans la Chambre claire, la note est tenue au sens musical du ça a été » au c’est ça » la photo, c’est tout à la fois le passé immobilisé dans le passé et le passé présenté au présent. Il est difficile alors de ne pas songer au ça » de Freud qui ignore le temps et qui est la présence en nous de ce que nous appelons passé ». 55Barthes écrit On dirait que la Photographie emporte toujours son référent avec elle, tous deux frappés de la même immobilité amoureuse ou funèbre, au sein même du monde en mouvement ». On dirait – écrit-il au conditionnel, puisqu’il sait très bien que la photo n’emporte rien – Barthes pourrait donc bien être d’accord avec ça… 56Je reprends. 57 La photo est littéralement une émanation du référent » cela veut dire que la photo coule manare en latin, découle de la personne photographiée, de sa chair » selon le mot que Barthes emploie aussi à ce propos. L’émanation est une provenance physique ou plus exactement chimique, une empreinte, un jaillissement ou un suintement. Bien sûr pour un philosophe le mot émanation » fait penser à Plotin. C’est bien de l’Un que ça émane ou c’est l’Un qui émane, procède ou irradie – l’Un lui-même… 58L’émanation donne lieu à l’ évidence rare du “ainsi, oui, ainsi, et rien de plus” ». 59Dans la Chambre claire, il dit de la photo qu’elle n’est jamais qu’un chant alterné » de voyez, vois, voici », qu’elle ne peut sortir de ce pur langage déictique. C’est pourquoi elle est si proche du haïku. 60Et pourtant on peut approcher par ce biais la grande tautologie d’Exode, III, 14. 61Ehyeh asher ehyeh. Yahwé désigne la création, se désigne et nous dit voyez, voici. Voici mon selfie, voici ma photo ! Tel je suis ! tel je serai ! fiat lux, flash. Le sens n’y est qu’un flash, une griffure de lumière ». Clic ! Barthes aime beaucoup le bruit des appareils photo. 62Il va de soi qu’il n’y a pas de pellicule dans l’appareil, pas plus qu’il n’y a de sé dans le sa Dieu » comme le souligne Barthes dans Comment vivre ensemble ? 63 Dieu comme sa » alors que Dieu = sé absolu puisqu’en bonne théologie, il ne peut être le sa de rien d’autre que de lui-même Je suis celui qui suis ». 64Phototautothéologie. 65Et que dit Yahwé ou que montre-t-il ? il répète RB, Rimbaud cette fois Je est un autre » bien sûr puisqu’il est l’Autre avec majuscule. Dans FDA, Barthes dit que comme sujet amoureux, il n’est pas un autre, qu’il ne peut être autre et que c’est ça qui le rend fou ! 66Donc il est je », je est je », tautologique. Démoniaque la tautologie ? 67C’est le moment de revenir à l’unicité dont parlait Clément Rosset et qui est essentiellement liée à l’existence réelle du to auto, du même. Unicité de l’aimé, unicité de l’instantané saisi par la photo ou le haïku et unicité du Dieu unique. Tel El est après tout le plus ancien nom du dieu qui n’a pas de nom. Fragment ARTS 68Dans le nom de Barthes il y a le mot arts » au singulier et au pluriel. Jude Stefan a également repéré art » dans le nom de Barthes. J’intègre le s » final pour engager une diversité de pratiques, puisque c’est ce qui arrive chez Barthes. Était-il gêné de cette boursouflure au sein de son nom ? mais avec le H E, le nom s’écarte du mot et part dans une échappée silencieuse, discrète – hypersémantique. 69Georges Steiner, dans le commentaire qu’il fait de la tautologie yawhique, pense que ses échos au xxe siècle sont artistiques ; j’ajoute qu’ils ne peuvent que l’être la tautologie divine ou le divin comme tautologie ne peuvent aujourd’hui qu’émaner - en art. 70L’une des formes artistiques est musicale c’est Schoenberg, dans le Moïse et Aaron. 71Schoenberg ne met pas en musique le je suis qui je suis » mais laisse Moïse décliner la liste des traits de son inaccessibilité ». Inconcevable parce qu’invisible, inconcevable parce que incommensurable, inconcevable parce que infini. 72Les voix qui sortent du buisson ardent tous les modes de voix suggèrent que ce n’est que par la pluralité via une perception fragmentée, que l’oreille humaine peut saisir l’unité cachée de l’auto-désignation de Dieu ». 73Répétons que le Moïse et Aaron est inachevé et que la partition se termine sur le cri de Moïse 74 O Wort, du Wort das mir fehlt » = 75 Rien ne saurait, rien ne peut Lui donner expression. 76O mot, mot qui se dérobe à moi ! » mot, ou verbe »… 77Inexpressif Yahwé ? Cela doit plaire à Barthes. 78L’autre évocation est poétique puis qu’elle se trouve dans le Psaume ou contre-psaume de Celan qui, selon Steiner, en écrivant 79Loué sois-tu, Personne 80paraphrase la tautologie et profère Je ne suis pas ce que je suis » ou Je ne suis plus ce que j’étais ». 81Quand Barthes recherche la bonne photo de la mère – l’aphoto l » apostrophe de l’amer l » apostrophe –, il est seul, sa mère est morte. Seul comme Yahvé ? selon Steiner on peut entendre dans la grande tautologie divine, l’écho assourdi d’une solitude infinie, la grammaire du spéculaire dans la tautologie étant la figuration d’un esseulement ». 82La bonne émanation de celle qui me laisse seul, irrémédiablement, est aussi celle qui me permet de dire sa tautologie. Mam » c’est presque même » aussi bien que m’aime ». Mais c’est mieux encore si m – a – m à la place d’un être » et d’une identité simple, un avoir » et un rapport, ou bien une exclamation ah !. 83 Oh ! ah ! personnellement j’aime ces interjections très littéraires ; il me semble que ça déraidit la syntaxe […] un oubli du thétique, un non-contrôle de la loi sujet/prédicat ; un bref sanglot ou soupir comme en musique ». 84Le développement d’une tautologie ne peut s’accomplir dans le langage si ce n’est par la répétition toujours à nouveau remarquée qu’en a faite Gertrud Stein a rose is a rose is a rose ». En se relançant, la tautologie se révèle infinie. 85 … Et la littérature commence, c’est-à-dire un langage mystérieusement tautologique » préface à Chateaubriand Vie de Rancé. 86 A rose is a rose is a rose… » – On sent bien que c’est immédiatement musical n’est-ce pas, Rose ? RB, Rodolphe Burger pourrait le chanter ?. La tautologie bascule dans l’alogie, dans l’exemption de sens si recherchée, si goûtée par Barthes. 87Le poétique a en charge le bruissement de la langue l’affleurement du sens, l’effloresens s-e-n-s de la pivoine, de la rose en son propre nom – la rose de rien, de personne » dans Psaume, toujours. 88Comme lorsqu’on entend parler une langue étrangère inconnue mais pas trop lointaine, par exemple dans les films d’Oliveira, quand on entend parler portugais et qu’on ne connaît que le français et l’espagnol, c’est très beau. 89Et si l’on comprend aisément le basculement dans le poétique et le musical, il est remarquable que la tautologie ait aussi ses versions picturales par exemple chez un des maîtres du genre de l’art dit tautologique » Joseph Kosuth or – c’est à peine croyable – cet artiste est une référence de Barthes… et notamment Thing. 90La chose, dans la définition par le dictionnaire du mot chose » montrée ou exposée en tant qu’œuvre donne ce que Jean-François Lyotard appelle, à propos de Kosuth, la tautologie visible et lisible » dont la forme générale est ceci est une phrase » où la phrase devient elle-même et une chose. 91Les choses étant ce qu’elles sont… Fragment M même – le fragment même m’aime, mam 92Comment parler, comment écrire quand sont exclus définitions, nominations, stéréotypes, signifiés, grands mots usés et usants, quand sont exclus articulations, continuités, descriptions, sujets, prédicats, tous les sujets, tous les prédicats, tous les mécanismes du sens, les thèses, les antithèses, la dialectique ? 93Je ne voudrais pas paraître défendre la tautologie. Elle me lasse comme me lassent le sujet, le prédicat, la copule privée d’esprit. Plutôt que la nuit c’est la nuit », ôter l’être nuit et nuit ». 94Que reste-t-il de la langue ? Que reste-t-il à la langue ? 95 Seule demeure la langue maternelle », nous dit Hannah Arendt. 96Il ne s’agit pas d’idéaliser la langue maternelle. C’est plutôt le maternel de toute langue qui est en jeu. 97Éric Marty note qu’il avait été frappé du fait que la mère parlait le barthes » – j’ajoute les barthes, plus d’une langue. Barthes aura répété la langue maternelle, il aura dit le même qu’elle. Dans la Chambre claire, l’amour de la langue et l’amour de la mère ne font qu’un» écrit Milner. 98Ça – faut-il même le dire ? Faut-il dire le rien à dire, le rien du dire ? Barthes se pose la question et répond oui »… 99 Grand paradoxe d’écriture rien ne peut se dire que rien » préface à Pierre Loti Aziyadé. 100Avec toutes ces contraintes coincées dans la gorge, avec le sens obstrué », avec rien à dire, Barthes a écrit tout ce qu’il a écrit ; il ne fallait donc pas lui couper la gorge » ce qu’annonce Barthes à ses amis avant sa trachéotomie d’autant que 101 C’est dans le gosier, lieu où le métal phonique se durcit et se découpe…que la signifiance éclate, fait surgir, non l’âme, mais la jouissance ». 102Une voix s’éteint l’impossible même. Il est impossible que Barthes perde sa voix, même si et justement si la voix est toujours déjà morte ». Le mort ne cesse pas de nous parler, répétant la chose même. 103Cher Roland Barthes, Platon et Derrida ont écrit une Thotologie t-h-o-t, du nom du dieu de l’écriture – Thot. 104Me déplaçant de l’Égypte vers l’Orient extrême j’aurai tenté gauchement de vous désécrire une Taotologie.
roland barthes j aime je n aime pas